Depuis quelques années, j’essaie de lister les livres que je lis. Ils sont au nombre de soixante, soixante-dix – et, cette année, j’atteins plutôt les quatre-vingts. D’une manière générale, je me reproche toujours de ne pas lire assez et de ne pas connaître à quarante ans tel grand classique ou de ne pas avoir creusé certains sujets. Mais je fais ce que je peux et, quand je consulte mes cahiers, je me rends compte que mes lectures sont assez variées.
Ci-dessous, on trouvera un classement non exhaustif avec des liens vers de petits comptes-rendus qui se trouvent sur ce site.
Littérature contemporaine
Christian Bobin, La Grande Vie
Diane Peylin, La Grande Roue
Sylvain Tesson, Dans les forêt de Sibérie
Voilà des ouvrages qui ne sont guère récents. Je n’ai pas acheté les grands romans de la rentrée littéraire, ni même le prix Goncourt. La raison en est simple: ces livres coûtent cher! Christian Bobin a une très belle écriture, mais l’essai ci-dessus, avec ces phrases poétiques, est assez creux. J’aurais bien de la peine à en résumer la pensée. Diane Peylin est ardéchoise. La Grande Roue est construit sur une intrigue élaborée, mais, elle aussi, comme beaucoup d’auteurs français, donne dans un certain formalisme, un style ampoulé assez agaçant. J’aime toutefois sa façon de traiter des sujets d’actualité, comme la question du genre ou les violences faites aux femmes.
Littérature classique française
Stendhal, Vie de Henry Brulard, Les privilèges
Gustave Flaubert, Trois contes
Balzac, Le Père Goriot
Marcel Aymé, Les Tiroirs de l’inconnu
François Mauriac, Le Baiser aux lépreux, Genitrix
Marguerite Yourcenar, L’Œuvre au Noir
Robert Merle, La Mort est mon métier
J’ai beau vouloir m’ouvrir aux œuvres contemporaines, j’en reviens toujours aux classiques. Ils me plaisent pour leur justesse et leur style. De ces quelques ouvrages, je retiendrai « La Légende de Saint Julien l’Hospitalier » dans les Trois Contes. Un pur moment d’évasion dans tout ce que le Moyen Âge a de merveilleux!
Littérature étrangère
Novalis, Les Disciples à Saïs
Franz Kafka, La Métamorphose
William Faulkner, Absalon! Absalon!
Vladimir Nabokov, Lolita
Ernst Jünger, Sur les falaises de marbre
Comme je travaille en ce moment sur une trilogie intitulée Metamorphosis, on comprend aisément que je me devais de lire Kafka. Contrairement à ce qu’on croit, Gregor Samsa ne se transforme pas en insecte, mais en « vermine ». Le récit est allégorique et a beaucoup à voir, selon moi, avec les rapports qu’entretient l’écrivain avec sa famille et un milieu bourgeois étriqué. J’ai beaucoup apprécié le romantisme allemand, ces œuvres empreintes de mysticisme qui se trouvent réunies dans un volume de la Pléiade. Plus que tout, je louerai Nabokov auquel j’ai consacré un long article cet été.
Romans policiers
Emile Gaboriau, Le Petit Vieux des Batignolles
Georges Simenon, Maigret à Vichy
Gregg Olsen, Lying next to me
Rien ne m’a transporté dans ces trois romans. Simenon est d’une grande platitude, les procédés d’Olsen ont un air de déjà vu. Seul Gaboriau, père du roman policier, obtient grâce à mes yeux. Le court roman que je mentionne est efficace et bien construit. On se rend compte que le genre atteint une certaine maturité dès ses débuts et se sclérose assez vite.
SF et Horreur
Arthur C. Clark, Rendez-vous avec Rama
Cixin Liu, Le Problème à trois corps, Boule de foudre
Stephen King, Docteur Sleep, Fin de Ronde

Cette année, je me suis mis à la SF. Rendez-vous avec Rama, quoique pauvre en aventures et rebondissements – au fond il ne s’agit que de la visite d’un vaisseau extraterrestre – expose des idées originales, comme des êtres aux corps non pas symétriques (deux jambes, deux bras), mais ternaires (trois jambes, trois bras). Ce premier volume intrigue et donne envie de lire la suite. J’ai été quelque peu déçu par Stephen King. Ces derniers romans sont moins bons, à mon goût, que les premiers. En revanche, je ne pourrai assez louer Cixin Liu. Cet auteur chinois est en quelque sorte un génie cosmique et sa trilogie balaie avec une extraordinaire profondeur le futur de notre civilisation et de notre univers!
Littérature ancienne
Sophocle, Oedipe roi, Ajax
Jules César, Commentaires sur la Guerre des Gaules
Virgile, Géorgiques (livre IV)
C’est toujours un plaisir pour moi de me plonger dans les langues anciennes. La poésie antique, qu’elle soit grecque ou latine, est plus souple, plus ample, plus rythmée que la nôtre et les auteurs mentionnés ci-dessus sont si puissants que leurs successeurs nous paraissent bien mesquins – surtout les auteurs contemporains…
Nouvelles
Roald Dahl, Kiss Kiss
Progetto Babele (recueil de nouvelles diverses en italien)
Jeffery Deaver, Twisted
Si les premières nouvelles de Deaver m’ont plu pour leur chute, j’ai trouvé assez médiocre le reste du recueil. En revanche, je ne cache pas mon admiration pour Roald Dahl dans le lien ci-dessus.
Poésie
Jean de La Fontaine, Fables (livre I et II)
Aloysius Bertrand, Gaspard de la Nuit
Sully Prudhomme, Les Solitudes
Aloysius Bertrand est un poète original, mais maniéré. Prudhomme appartient au Parnasse. Aujourd’hui, on le trouve froid. Certains de ses poèmes sont toutefois d’une grâce singulière, comme « Le Cygne »:
Sans bruit, sous le miroir des lacs profonds et calmes,
Le cygne chasse l’onde avec ses larges palmes,
Et glisse. Le duvet de ses flancs est pareil
A des neiges d’avril qui croulent au soleil ;
Mais, ferme et d’un blanc mat, vibrant sous le zéphire,
Sa grande aile l’entraîne ainsi qu’un lent navire…
De tous les poètes de notre langue, La Fontaine est un de ceux que je préfère. Ces œuvres sont souples, élégantes, variées, présentent différents niveaux de lecture. Pour Céline, il est le seul poète du XVIIe à avoir écrit de bons vers…
Théâtre

William Shakespeare, Macbeth
Johan Wolfgang von Goethe, Faust
Gérard de Nerval, Flammel, Faust
J’ai assez expliqué, dans le lien ci-dessus, la puissance et la noirceur de l’œuvre de Shakespeare. Pour ce qui est du mythe de Faust, il m’intéresse dans le cadre de ma trilogie et de son savant fou que l’on va mieux connaître au fil des volumes. Au passage, Nerval ne soutient guère la comparaison face à Goethe…
Les infréquentables
Robert Brasillach, Les Sept Couleurs
Drieu La Rochelle, Rêveuse bourgeoisie
Céline, D’un château l’autre
Cet été, je suis tombé par hasard sur quelques vieux bouquins, dont les auteurs très à droite que je viens de citer. Les Sept Couleurs, qui mélange différents genres, est assez fade, mais préfigure le Nouveau Roman. Rêveuse bourgeoisie m’a paru daté et médiocre. Le point commun de leurs deux auteurs, qui ont collaboré et ont mal fini (l’un est fusillé à la Libération, l’autre se suicide), est une grande lâcheté et une forme de dégoût pour la société rance et décadente dans laquelle ils vivent. Les régimes fascistes représentent pour eux la jeunesse et le progrès! Céline, quant à lui, est à part. C’est un homme odieux, mais un écrivain de génie.
Les autoédités

Lamatre, L’Effet papillon
Magnus Latro, La Fabrique des bâtards
Alex Parker, Tsahan
Claude Marion, Le Bonheur est une fatalité
Franck J. Mathews, Le Nouveau Parleur
Alexandre Page, Partir, c’est mourir un peu
Solène Chartier, Amalia
Les œuvres que je cite sont de bonne facture, dans l’ensemble. Leurs auteurs font appel à des bêta-lecteurs et font corriger leurs textes par des professionnels. Pour beaucoup, leurs romans sont au niveau des maisons d’édition traditionnelles.
Il faut bien noter tout de même qu’on est souvent déçu quand on parcourt les livres disponibles dans l’abonnement KU d’Amazon. Ce sont des récits très stéréotypés, correspondant à un lectorat précis. C’est dommage, car le principe de l’autoédition et des genres tels que la Fantasy laissent aux auteurs une grande liberté…
(Les lecteurs curieux trouveront ci-dessus les interviews d’Alexandre Page et de Franck Mathews.)
Philosophie
Descartes, Le Discours de la Méthode
Baruch Spinoza, Ethique (Première partie)
Leibnitz, La Monadologie
Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra
Si je me suis intéressé à la philosophie, c’est par curiosité, par passion, mais aussi parce qu’un des personnages de Metamorphosis est étudiant en philosophie.
Essais
Joseph Campbell, The Heroe with a Thousand Faces
Jean-Marie Pelt, Pierre Rabhi, Le monde a-t-il un sens?
Jean-Marc Drouin, Philosophie de l’insecte
Noah Yuval Harari, Homo Deus
Pierre Rabhi est une autorité morale en matière d’écologie, un grand sage et un Ardéchois qui plus est! Dans cet essai est développée la thèse suivant laquelle l’univers, depuis le Big Bang, et la vie, depuis son apparition sur Terre, reposent sur l’alliance, la coopération, plus que sur l’opposition et la rivalité. Pour un lecteur de Darwin, la démonstration est contestable. Mais elle fait du bien dans nos sociétés dominées par la productivité, la compétition, le libéralisme.
Pour ce qui est de Drouin, j’ai regretté qu’il s’intéresse surtout aux principes de classification dans l’histoire de l’entomologie et pas assez à la prolifération et à la tendance évolutive qui poussent les insectes à s’associer (fourmis, abeilles, termites).
Quand j’aurai lu Sapiens, j’écrirai un article sur Harari et ses travaux pour le moins ambitieux. En attendant, je peux dire que ces essais sont stimulants, quoique regorgeant de partis pris, et que sa vision de l’avenir dominée par la technologie fascine et inquiète à la fois. L’auteur, je me permets de le rappeler, assure que l’humanité a surmonté les famines, les guerres et… les épidémies! Et qu’elle va pouvoir se consacrer à la recherche de l’immortalité, du bonheur et même de la divinité. A l’heure actuelle, cela nous paraît relever de la science-fiction, mais qui sait?
Science
Brian Green, L’Univers élégant, La Réalité cachée
Carlos Calle, Supercordes et autres ficelles – Voyage au cœur de la physique
Cette année, je me suis intéressé aux sciences en parfait amateur. Là encore, c’est ma trilogie qui m’a amené à faire ces lectures. Il me fallait trouver quelque théorie cohérente qui explique comment mes deux héros parviennent à rétrécir. Je me suis penché ainsi sur la théorie des cordes, qui propose une synthèse de la relativité générale et de la mécanique quantique, une unification des quatre grandes interactions, de l’infiniment grand à l’infiniment petit. Elle n’a pas encore été prouvée expérimentalement. C’est surtout une construction mathématique. Elle suppose que les particules élémentaires seraient issues de la vibration de cordes ou de membranes à des échelles infimes et dans un espace doté de six ou sept dimensions spatiales supplémentaires, mais enroulées sur elles-mêmes. Il s’agit là d’une théorie du tout que je voudrais concilier avec l’alchimie…
Spiritualité
Upanishads
Maître Eckart, Traités et Sermons
Bossuet, Oraisons funèbres
Dans ce paragraphe, j’aurais pu ajouter Le Héros aux mille et un visages de Joseph Campbell. D’une manière générale, j’aime beaucoup les textes sacrés et en particulier la Bible. J’aime relire L’Ecclésiaste, les Psaumes et les Evangiles, en particulier celui de saint Jean. Ces textes sont beaux par eux-mêmes et d’une profondeur qu’on a jamais fini de sonder. Ils nous invitent à réfléchir sur le sens de la vie et du monde, questions qu’on ne peut éluder…
Pour terminer, je regrette que Bossuet ne soit pas davantage connu et étudié. C’est assurément un de nos plus grands écrivains. Si je pouvais remonter le temps, j’aimerais assister à une représentation d’Oedipe roi (Ve siècle av. J.-C.), à la lecture faite par Virgile devant Livie et l’empereur Auguste de certains passages de l’Enéide, en particulier le chant VI (Ier siècle av. J.-C.) et à « L’oraison funèbre du Grand Condé » à Notre-Dame (XVIIe siècle).

De cette longue liste, on retiendra donc l’Oedipe roi de Sophocle, Macbeth, Les Oraisons funèbres de Bossuet, Lolita de Nabokov et Le Problème à trois corps de Cixin Liu!
Je vous souhaite un joyeux réveillon, malgré toutes les contraintes que nous impose le Coronavirus. A l’année prochaine!